Dans les années 1990, un homme a découvert un algorithme permettant de gagner, presque à coup sûr, au loto, avec une formule très simple.
Non, ce n’est pas de la chance. Si Stefan Mandel a gagné 14 fois au loto, c’est le résultat de plusieurs années de recherches et de calculs, et surtout le fruit d’un réseau gigantesque impliquant des centaines de complices.
Tout commence aux alentours de 23 heures, le 15 février 1992. Une main innocente tire les boules devant le siège de la loterie de l’État de Virginie, en direct à la télévision américaine.
Six numéros gagnants sortent : le 8, le 11, le 13, le 15, 19 et le 20. Mais un fait retient rapidement l’attention des autorités américaines : une personne remporte le jackpot de 27 millions de dollars, mais également les 6 deuxièmes prix, les 132 troisièmes prix et 135 000 petits prix. À ce niveau-là, ça ne peut pas être de la chance.
Un calcul très simple
Derrière ce gain improbable se cache en vérité un réseau impliquant des centaines d’investisseurs internationaux et des dizaines de systèmes informatiques, le tout orchestré par un seul homme : Stefan Mandel.
L’histoire de ce génie de la loterie commence dans la Roumanie communiste des années 1970. Face à la misère, Mandel, un autoproclamé « philosophe mathématicien », est convaincu que l’arithmétique peut rendre riche.
Il voit dans la loterie une opportunité de changer de vie. Après des années de recherche et d’étude, il met au point un algorithme basé sur une méthode qu’il appelle la « condensation combinatoire ».
Mais alors quelle est cette formule magique qui permet de presque toujours gagner au loto ? La méthode est plutôt simple. Mandel affirme d’ailleurs que « n’importe quel lycéen en mathématiques peut calculer ces probabilités ».
D’abord il faut calculer le nombre total de combinaisons possibles. Pour une loterie dont la règle est par exemple de trouver six bons numéros entre 1 et 40, le nombre total de combinaisons s’élève donc à 3 838 380.
Une fois la probabilité calculée, il s’agit de jouer seulement lorsque le jackpot est bien supérieur au nombre de combinaisons possibles.
Exemple : si le nombre est d’environ 3 millions, mieux vaut seulement jouer quand le pactole s’élève à 6 millions d’euros minimum, afin de récupérer un montant intéressant par rapport à l’investissement. Le montant total des combinaisons multiplié par le prix d’une mise doit être inférieur au gain maximal. Sinon, ce n’est pas rentable.
Des centaines d’investisseurs
Pour s’assurer de gagner, Stefan Mandel a alors une technique simple : il achète une grille de loterie pour presque chaque combinaison possible, souvent avec l’aide de plusieurs complices, avec qui il partage les gains. En achetant des millions de grilles, Stefan Mandel et ses complices gagnent quasiment toujours.
Pour son premier coup, le mathématicien s’associe à quatre amis, sur une petite loterie roumaine. Bingo ! Lui et ses complices remportent 72 783 lei (environ 17 000 € en prenant en compte l’inflation). Dans les années qui suivent, Mandel reproduit plusieurs fois le système, avec des montants bien plus importants à la clé.
Pendant plusieurs années, il convainc des centaines d’investisseurs de regrouper leur argent et de créer un « syndicat de loterie ». Il développe ensuite un système d’automatisation complet : une pièce avec de nombreuses imprimantes et ordinateurs fonctionnant sur un algorithme qui préremplit les billets avec chaque combinaison.
Une technique inapplicable aujourd’hui
Dans les années 1980, le syndicat de Mandel tourne à plein régime. Lui et son équipe remportent 12 loteries (et récoltent 400 000 petits prix) à travers l’Australie, y compris une récolte de 1,1 million de dollars en 1986.
Pas dupe, le gouvernement australien finit par réagir et change la loi qui encadre les jeux de hasard. Il est désormais interdit qu’une seule personne puisse jouer toutes les combinaisons possibles.
Au lieu de se ranger sagement et de profiter de sa petite fortune, le mathématicien ne s’arrête pas là et jette son dévolu sur les États-Unis. Il réitère sa magouille dans six loteries américaines, dont celle du Massachusetts (jackpot de 37 millions de dollars pour 9 millions de combinaisons), de l’Arizona (11 millions de dollars pour 5,1 millions de combinaisons) et de la Virginie.
En tout, Stefan Mandel a remporté 14 fois le gros lot. Mais le Roumain passe le reste de sa vie à enchaîner les batailles juridiques avec les États dans lesquels il a commis ses manigances.
Sa méthode a durablement modifié les règles du loto dans le monde. En France, comme dans quasiment tous les pays, il est désormais impossible de jouer autant de mises en même temps. Inutile donc d’essayer chez vous.
Avec LePoint