Naturalisation, carte de séjour ou résident : le nouveau test imposé par l’État soulève de nombreuses critiques sur ses exigences et son impact sur les étrangers.
Deux jours avant de quitter le ministère de l’Intérieur, Bruno Retailleau, président des Républicains (LR), a signé un arrêté qui durcit considérablement le niveau de l’examen civique imposé aux candidats à la naturalisation.
Nouveauté importante : ce même test sera désormais obligatoire pour les étrangers souhaitant obtenir une carte de résident ou une carte de séjour pluriannuelle.
La mesure entrera en vigueur le 1er janvier 2026.
Un examen de 40 questions sur la République et la société française
L’arrêté, publié au Journal officiel du 12 octobre 2025, détaille la structure du nouvel examen. Il s’agira d’un QCM (questionnaire à choix multiples) de 40 questions réparties en cinq grandes thématiques :
Principes et valeurs de la République (devise, symboles, laïcité, mises en situation) – 11 questions
Système institutionnel et politique (démocratie, droit de vote, institutions européennes) – 6 questions
Droits et devoirs (droits fondamentaux, obligations en France, cas pratiques) – 11 questions
Histoire, géographie et culture (grands personnages, patrimoine, territoires) – 8 questions
Vivre dans la société française (travail, santé, éducation, parentalité) – 4 questions
Pour réussir, le candidat devra obtenir au moins 80 % de bonnes réponses en 45 minutes maximum.
Une mesure jugée trop stricte par les associations
Cette réforme suscite déjà de vives critiques.
Selon Danièle Lochak, professeure émérite de droit public et membre du Gisti (Groupe d’informations et de soutien des immigrés), « le nouvel examen sera une machine à exclure ».
Elle estime que le niveau de connaissances demandé dépasse largement celui d’un citoyen moyen, même diplômé, et s’inquiète de l’instauration d’un examen pour les cartes de séjour longues.
Une continuité de la loi immigration de 2024
Pour Jules Lepoutre, professeur de droit public à l’Université Côte-d’Azur, cet arrêté est la dernière mesure réglementaire issue de la loi immigration lancée en 2022 par Gérald Darmanin et promulguée en janvier 2024.
Cette loi vise à renforcer les exigences d’intégration à chaque étape du parcours des étrangers vivant en France.
Sous la direction de Bruno Retailleau, le ministère avait déjà réussi à réduire de 28 % les naturalisations par décret entre octobre 2024 et août 2025, notamment grâce à des instructions plus restrictives adressées aux préfectures.
Un parcours administratif de plus en plus complexe
Depuis la dématérialisation des titres de séjour en 2020, les démarches se sont complexifiées pour de nombreux étrangers.
Le Défenseur des droits rapporte une hausse de 400 % des réclamations liées aux titres de séjour entre 2020 et 2024, conséquence directe des lenteurs administratives et du manque d’accès à certains services numériques.
En juillet 2025, quinze associations, dont La Cimade et la Ligue des droits de l’Homme, ont saisi le tribunal administratif de Lille pour dénoncer des retards anormaux dans la délivrance et le renouvellement des titres de séjour.
Les ONG parlent d’un parcours du combattant, où chaque retard peut entraîner une rupture de droits sociaux ou la suspension d’un contrat de travail.
Vers une France plus sélective ?
Cette nouvelle version de l’examen civique pourrait accentuer les inégalités d’accès au séjour et à la naturalisation, notamment pour les personnes peu alphabétisées ou éloignées du système éducatif français.
Les associations envisagent de saisir le Conseil d’État pour contester la mesure, arguant qu’elle pourrait être disproportionnée, inconstitutionnelle ou contraire aux droits fondamentaux.
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