Enthousiaste admirateur du Troisième Reich et responsable de méfaits à travers diverses régions du globe, Dmitri “Wagner” Outkine avait adopté ce pseudonyme au sein du groupe paramilitaire russe qu’il avait co-fondé aux côtés d’Evguéni Prigojine.
Selon les autorités de l’aviation civile russe, il fait partie des dix passagers décédés dans l’accident d’avion qui a également coûté la vie au chef de la milice.
Le groupe Wagner a-t-il subi un coup dur dans le tragique accident d’avion survenu le mercredi 23 août dans la région de Tver, au nord-ouest de Moscou ?
Selon l’aviation civile russe, le chef de la milice, Evguéni Prigojine, ainsi que son bras droit, Dmitri Outkine, figuraient parmi les dix passagers de l’aéronef.
Alors qu’Evguéni Prigojine avait été un personnage public, son bras droit était demeuré longtemps dans l’ombre, évitant soigneusement les projecteurs et les regards du public.
Cependant, malgré sa stature imposante de deux mètres, cet homme imposant au crâne dégarni ne passait pas inaperçu.
Bien qu’il se soit habituellement tenu dans l’obscurité, Prigojine lui avait donné la parole dans une vidéo diffusée en juillet, où il annonçait que le groupe Wagner cesserait ses activités en Ukraine pour se tourner vers l’Afrique.
Sous les acclamations de ses subordonnés, on peut l’entendre proclamer : “Merci les gars, merci pour votre travail. Grâce à ce labeur, la SMP Wagner est maintenant reconnue à l’échelle mondiale. Ce n’est pas la fin, mais plutôt le commencement de la plus grande entreprise du monde qui sera bientôt entreprise.”
Peu d’informations sont disponibles au sujet de cet individu. Pour obtenir quelques éléments, il faut s’appuyer sur la vaste enquête menée par le site d’investigation Bellingcat. Dmitri Outkine est né en 1970 dans la région de l’Oural.
Il a été lieutenant-colonel au sein de l’armée russe pendant les deux conflits en Tchétchénie (1994-1996 et 1999-2009).
À mesure que l’intensité du conflit diminue, il est transféré près de la frontière estonienne à Petchory, où il occupe pendant une décennie le poste de commandant du GRU, les services secrets militaires russes.
À cette époque, il quitte l’armée, apparemment par ennui loin du front, comme le rapporte son ex-femme.
Sa trace se retrouve ensuite en Syrie. En 2013, il aurait rejoint les rangs des forces de Bachar al-Assad au sein du Corps slave, à une époque où le mercenariat est encore interdit en Russie.
Leur seule bataille enregistrée se solde par un échec cuisant, les mercenaires subissant une défaite face à un groupe rebelle lié à Al-Qaïda.
La plupart des membres du Corps slave sont arrêtés à leur retour de Syrie. Dmitri Outkine est-il parmi eux ? La réponse demeure incertaine.
Néanmoins, les mercenaires et Dmitri Outkine se retrouvent rapidement en Ukraine à l’éclatement du conflit en 2014. Moscou requiert des forces pour soutenir les séparatistes dans le Donbass et en Crimée, tout en niant leur existence.
C’est dans ce contexte que la milice Wagner est formée, et le géant russe adopte ce nom de guerre. Un choix motivé par l’admiration d’Outkine pour le compositeur préféré d’Hitler, Richard Wagner.
Envoûté par le nazisme, Dmitri Outkine ne cache pas son fervent admiration pour le Troisième Reich. Des photographies le montrent torse nu, arborant deux tatouages au niveau de sa nuque, références au nazisme : le symbole de la SS ainsi qu’un aigle et une croix gammée.
Ceci vient contrecarrer la narration officielle du Kremlin qui présente l’opération en Ukraine comme une initiative visant à dénazifier le pays.
Avec Wagner, Outkine devient un aventurier des conflits à l’échelle mondiale. Alors qu’au printemps 2014, l’ancien parachutiste et ses troupes opèrent en Crimée, il les conduit ensuite en Syrie entre 2015 et 2018, soutenant ainsi les forces russes.
Durant cette période, il jouit de la faveur du Kremlin. En décembre 2016, Vladimir Poutine en personne lui décerne l’Ordre du Courage pour sa contribution à la prise de Palmyre. Sa photographie en compagnie de Poutine circule sur les réseaux sociaux et constitue l’une des rares images connues du mercenaire affichant son visage.
Entre 2017 et 2019, le groupe Wagner s’engage aux côtés du dictateur Omar el–Béchir au Soudan, avant que ce dernier ne soit renversé en 2019.
Au printemps de cette même année, environ 300 mercenaires de Wagner se trouvent en Libye pour apporter leur soutien à Khalifa Haftar, le général de l’armée nationale libyenne.
Des informations divergentes circulent quant au rôle de Dmitri Outkine dans la mutinerie de Wagner en juin 2023, comme le relève Le Monde.
Selon un ancien camarade d’armes, Dmitri Outkine aurait adopté une position en retrait, tandis que selon Orden Respubliki, une organisation clandestine hostile au Kremlin et à la guerre en Ukraine, il aurait personnellement dirigé la colonne de mutins.