Des CV, longtemps plébiscités, sont aujourd’hui pointés du doigt par les professionnels du recrutement. Ces documents seraient plus souvent rejetés par les logiciels de tri utilisés par les entreprises.
Le débat fait rage sur le réseau social LinkedIn. Depuis plusieurs semaines, recruteurs, coachs et professionnels des ressources humaines multiplient les mises en garde contre les curriculums vitae créatifs. Un revirement surprenant alors que pendant des années, la créativité était encouragée pour se démarquer des autres candidats.
Cette évolution s’explique par l’utilisation croissante des “Applicant Tracking Systems” (ATS) dans les entreprises françaises. Derrière cette expression se cachent des logiciels sophistiqués qui peuvent assister les recruteurs tout au long du processus d’embauche : de la publication des offres d’emploi jusqu’à la communication avec les candidats, en passant par le tri automatique des CV.
Si le phénomène reste difficile à quantifier en France, une enquête de la plateforme Hellowork révèle que 46% des professionnels du recrutement utilisent déjà un ATS. Un chiffre qui grimpe à 99% pour les grandes entreprises américaines, selon une étude de la Harvard Business School réalisée en 2021.
Face à l’afflux massif de candidatures pour certains postes, surtout dans les grandes entreprises, ces outils permettent un gain de temps considérable en effectuant un premier tri automatique des CV.
Cependant, des témoignages de plus en plus nombreux mettent en lumière les limites de ces systèmes. Les ATS auraient tendance à écarter certains profils pourtant pertinents uniquement en raison du format de leur CV. Les documents réalisés sur Canva, plateforme populaire de création graphique, sont particulièrement concernés.
Concrètement, plusieurs éléments graphiques posent problème aux ATS. Les graphiques en étoiles ou en barres, censés représenter visuellement le niveau de maîtrise des langues ou des compétences techniques, ne sont pas “lus” par ces logiciels. Les colonnes multiples, les zones de texte superposées ou les tableaux complexes perturbent l’analyse. Même les polices de caractères trop fantaisistes ou les variations de couleurs peuvent compromettre la bonne lecture du document.
Laura Dugrava, jeune entrepreneuse qui donne des conseils sur le monde du travail, recommande de privilégier des CV au format standard, avec des sections clairement délimitées et sans fioritures excessives. Cette approche plus classique maximiserait les chances de franchir le premier filtre des ATS.
Le problème ne se limite pas à l’aspect esthétique. Certains modèles de CV proposés par le site Canva peuvent comporter des calques invisibles qui masquent complètement le contenu aux yeux des ATS. Un CV ainsi “caché” sera automatiquement écarté, quelles que soient les compétences du candidat.
Caroline Fernandez, consultante en visibilité, suggère de ne pas abandonner toute créativité, mais de trouver un juste équilibre et de passer par des outils comme Microsoft PowerPoint pour concevoir son CV. Elle conseille aussi de le tester sur des plateformes spécialisées comme cvreader.fr. Ce site gratuit simule la lecture d’un CV par un ATS et permet ainsi de vérifier si votre document sera correctement interprété par les logiciels de recrutement.